Une ma­jo­rité des mé­di­ca­ments en vi­tri­ne sans ef­fi­caci­té pro­u­vée

Près de 60% des médicaments exposés dans les vitrines des pharmacies en Suisse n’ont pas d'efficacité médicalement prouvée. C’est la conclusion d’une étude menée par une équipe de médecins du Centre hospitalier Bienne.
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02. Oktober 2023

A l’aide de photos de vitrines de 68 pharmacies choisies au hasard en Suisse – et d’une analyse minutieuse de la littérature médicale – des médecins de la Clinique de médecine du Centre hospitalier Bienne ont démontré que seuls 418 (ou 43,1 %) des 970 médicaments examinés au total ont une efficacité prouvée. Pour les 556 autres médicaments (ou 56,9 %), les données (ou l’évidence) sont trop minces pour pouvoir tirer des conclusions fiables sur leur efficacité.

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Davantage de médicaments à l’efficacité prouvée au printemps

Entre juillet 2019 et mai 2020, les médecins ont photographié quatre fois chaque vitrine de pharmacie afin de pouvoir tenir compte, dans leur étude d’observation, des variations saisonnières de l’offre de médicaments dans les vitrines. Il s’est effectivement avéré qu’au printemps, il y avait plus de médicaments à l’efficacité prouvée dans les vitrines. «Cela s’explique surtout par les médicaments contre le rhume des foins», explique Prof. Dr med. Daniel Genné, médecin-chef de la Clinique de médecine. «De nombreux antihistaminiques très efficaces sont disponibles sans ordonnance – et peuvent donc être promus.»

Sur l’ensemble de l’année, les médecins autour de Genné n’ont pas trouvé de différence significative dans leurs analyses statistiques entre les 32 pharmacies de Suisse alémanique et les 36 pharmacies de Suisse romande et du Tessin. Mais sur les 66 médicaments exposés dans les vitrines hivernales en Suisse alémanique, seuls 11 avaient une efficacité avérée. En revanche, en Suisse romande et au Tessin, un médicament sur deux dans les vitrines de la saison hivernale avait une efficacité prouvée. «Cela a peut-être un rapport avec le fait qu’il y a plus de preneurs de la médecine parallèle en Suisse alémanique», explique Genné.

Des informations sérieuses sur la santé

Pour son équipe, il ne s’agit pas de dénigrer le travail des pharmaciens. Car, premièrement, ceux-ci sont limités dans leur choix: La publicité pour les médicaments délivrés sur ordonnance étant interdite, les pharmacies ne peuvent par exemple pas mettre d’antibiotiques dans leurs vitrines. Et deuxièmement, l’équipe de Genné a observé que les vitrines ne contiennent pas seulement des médicaments ou des produits cosmétiques, mais aussi des informations sérieuses sur la santé et des recommandations valables (par exemple pour les vaccins contre la grippe ou la méningite transmise par les tiques). «Ce sont des contributions très précieuses aux soins médicaux de base», affirme Genné.

Un label pour la fiabilité des preuves médicales

Mais comme les patientes et patients ne sont souvent pas conscients que les médicaments sans ordonnance peuvent interagir avec d’autres médicaments, Genné désapprouve que tant de médicaments sans efficacité prouvée se trouvent dans les vitrines – et sont ainsi indirectement recommandés au public. «De la même manière que les appareils électriques sont classés de A à F en fonction de leur efficacité énergétique, afin d’encourager l’achat d’appareils moins gaspilleurs, les médicaments pourraient également être classés», écrivent les chercheuses et chercheurs dans leur article qui vient de paraître dans le British Medical Journal Open. «Un label pourrait indiquer en couleur le degré de fiabilité de l’évidence médicale concernant la substance active contenue dans le médicament», explique Genné.


Publication originale

Känzig T, Potterat M, Corpataux T, Ackermann S, Chaix E, Gibilisco A, Portmann A, Roberts J, Schaller A, Wenger N, Wolffers O, Béguelin C, and Genné D. Does the advertisement in Swiss pharmacy windows rest on evidence-based medicine? An observational study. BMJ Open Sep 2023, 13 (9) e069186; DOI: 10.1136/bmjopen-2022-069186